mardi, octobre 10, 2006

La balkanisation de la gauche

Un peu d'histoire. C'était en 1974. Lors de l'éléction présidentielle, la gauche démocratique présente un et un seul candidat : François Mitterrand. Le Parti Communiste, pourtant encore un parti très puissant et influent, fait le choix du compromis et de la stratégie d'union pour la victoire en décidant de se rallier au programme commun conclu à Epinay en 1972. On connait la suite : Mitterrand passe à 400.000 voix de la victoire et la suite n'est qu'un grand délitement de cette union. Les communistes et les socialistes divorcent progressivement, et les divisions apparaissent vite au sein même du PS, entre tenants de la voie gauchiste, incarnée par Jean-Pierre Chevènement, et la voie "droitière", dont la figure emblématique a longtemps été Michel Rocard. Cette division s'affiche au congrès de Metz en 1979. Les figures de Mitterrand, puis de Jospin, qui ont permis d'avoir un effet fédérateur et autorisé des succès éléctoraux, ont été les arbres cachant la luxuriante fôret.
La faute à quoi ? A une perte de repères idéologiques totale pour la gauche. Dans les années 70, les thèmes de la rupture avec le capitalisme, formant un corps de doctrine homgène marqué par l'association du marxisme économique et de la démocratie (dont l'expérience Allende fût une éphèmère aventure), permettaient de rassembler toutes les forces de gauche. L'irruption quasi spontanée du libéralisme économique dans le débat d'idées et les pratiques gouvernementales à l'étranger ont eu un effet destabilisateur pharamineux pour le socialisme français.
La gauche n'est aujourd'hui plus unitaire que dans le discours autopersuasif de ses cadres et dans le partage de "valeurs" communes, dont elle n'a d'ailleurs nullement le monopole. L'exemple blairiste finit d'achever le travail, à cause de sa réussite.
35 ans après Epinay, la gauche va se présenter en ordre dispersé, ne retenant nullement les leçons de 2002 : Taubira et Chevènement cachent de moins en moins leurs ambitions. Le PC et l'extrême gauche sont plus éloignés du PS que jamais.
Comment ne pas comprendre alors que le socialisme français est à réinventer complètement ? Que son seul salut réside dans la recherche d'un nouveau dogme (même si le mot est connoté) basé sur la recherche du sens et des modalités des valeurs de solidarité, de République, de nation, de partage des richesses, dans un contexte de capitalisme désormais incontestable à moins de s'appeler Kim-Jong-Il ?
La première leçon à tirer est celle qu'il faut changer les têtes. Parmi les trois candidats à la candidature, il y en a prioritairement un qui doit sauter. Et parmi les trois candidats il y en a prioritairement une qui présente toutes les qualités pour être celle qui posera la première pierre du grand chantier socialiste. J'ai souvent critiqué Ségolène Royal, mais je dois ce soir admettre que son ascension n'est en rien dû au hasard : sa virginité, sa fraicheur font d'elle un recours quasiment miraculeux dans la perspective d'un indispensable renouveau.
Alors contre tous ses détracteurs, et malgré ma préférence pour DSK, moi aussi, ce soir, je suis un Ségoliste.