mercredi, novembre 29, 2006

Petites leçons d'anti-déclinisme

A droite comme à gauche, le mot d'ordre est général : la France va mal, elle décline, elle coule, elle s'effondre, elle s'affaisse, elle chute, elle est submergée... A gauche c'est d'une simplicité biblique : depuis quatre ans "le pays va mal, les gens souffrent, la France décroche". Depuis quatre ans bien sur, nous savons tous que 2002 constitue une véritable date charnière dans l'histoire de France. Avant tout allait bien grâce aux 35 heures et aux emplois jeunes, of course ! A droite, du moins du côté de la "nouvelle droite" Sarkozyste, c'est déjà plus poussé : tout va mal "depuis 25 ans", autrement dit, depuis que la gauche est arrivée au pouvoir et a plongé le pays dans une crise sans pareil (sans voir qu'une crise de même ampleur affecta l'Allemagne en son temps, malgré 18 ans de conservatisme libéral...), et depuis que Chirac-le-gauchiste a pris le relais de Mitterrand. A l'extrême droite, traditionnellement on fait remonter à 1789 le début de la fin, mais c'est la date de "30 ans" qui est maintenant avancée. Depuis la loi Weil ? Allez savoir...

Nul besoin d'être calé en histoire économique de la France pour saisir le côté fallacieux de ces raisonnements à but d'instrumentalisation. La peur fait recette. Celui qui ose apporter une quelconque nuance à ce noir tableau se verra immédiatement retourner cette réplique toute sarkozyste : "Si vous pensez qu'il ne faut rien changer et que tout va bien, c'est que vous n'avez rien compris. Qui osera du coup affirmer que la France a une dette publique inférieure à celle de l'Allemagne, bien inférieure à celle du Japon et de l'Italie ? un déficit commercial ridicule à côté de celui des Etats-Unis ? Un taux de chomage dans la moyenne de la zone Euro ? Ne parlons même pas des investissements directs ou de la protection sociale ! Vous seriez pris en flagrant délit d'optimisme ! Et chez nous, on ne mange pas de ce pain-là. Comme disait Roger Gicquel un soir de traque, "la France a peur", et pour nos chères têtes pensantes, c'est bien mieux comme ça.