samedi, novembre 18, 2006

De la féodalité des trusts

Oui, depuis 2002, la droite de gouvernement s'est transformée en un trust. Pendant 50 ans, la sécularisation de la société défaisant le lien idéologique par le catholicisme, la droite a été ce que la gauche n'était pas : conservateurs, libéraux, gaullistes, chrétiens-démocrates, principalement ont formé une famille plurielle, mais capable de succès éléctoraux car capable de s'unifier autour du refus du socialisme et de toute inclination vers le bloc de l'est.

Pendant 25 ans, autour du duo Giscard-Chirac, la droite s'est constituée en duopole, les chrétiens-démocrates s'alliant avec les libéraux d'un côté, les conservateurs et les gaullistes de l'autre, pour simplifier. Puis, le vent a soufflé de l'étranger, les révolutions conservatrices anglo-saxonnes scellant une alliance nouvelle entre les adeptes d'un libéralisme économique orthodoxe et les tenants du conservatisme moral et social, la France a, pour changer, eu un train de retard. Les récompositions de la droite ont tardé, du fait de l'emprise qu'a exercé le personnage de Chirac des années durant, empêchant la droite de suivre les mouvements de l'étranger, comme Mitterrand a tout fait pour freiner la mise au diapason du PS avec les partis sociaux-démocratiques européens.

C'est donc Sarkozy qui a tenté d'unir toute la droite sous sa propre bannière à partir de 2002, avec le libéralisme économique et la réaction sécuritaire comme ciments : les chrétiens-démocrates n'ont pas suivi et ont lutté comme ils ont pu contre l'OPA. Conservateurs et libéraux s'entendent à merveille, mais les gaullistes, qui n'ont que peu de choses en commun avec la rupture sarkozyste, sont aujourd'hui malmenés, ne se retrouvant pas, par filiation historique, dans la potion fortement américaine concoctée par les spin doctors de Sarkozy.

Illustration récemment avec l'opposition brutale entre le "chef" Sarko et la "dissidente" gaulliste Alliot-Marie sur le thème sensible de la discrimination positive. Elle a eu le tort d'afficher haut et fort sa différence, de ne pas dissimuler les divergences sous un unanimisme de façade : la réaction du "petit César" fut symptomatique de son état d'ésprit. César veut règner sur toute la droite, sur le grand trust qu'il a formé autour de sa petite personne, il ne supporte pas qu'on s'oppose à lui et à ses idées, et il le montre. Jusqu'à en perdre les règles minimales de respect dû à quelqu'un de sa formation, une femme de surcroît. Comment ne pas s'inquiéter d'une telle réticence à l'opposition, quand on sait qu'il y a de grandes chances qu'il soit le prochain chef de l'Etat. On en préfererait les toilettes de Ségolène...