mercredi, octobre 25, 2006

La France d'avant-hier

Il fut un temps où Philippe de Villiers était le porte-parôle privilégié d'une certaine France, une France rurale, du moins provinciale, attachée aux valeurs morales chrétiennes, à la souveraineté nationale, mais toujours dans un esprit républicain et démocratique. Dans ce rôle, il avait une certaine aura, une noblesse, que la finesse de son esprit et de son humour, ainsi que l'intelligence de certains des hommes qui l'entouraient (un fils de de Gaulle, un juge intègre, un millionnaire anglo-saxon original et anti-libéral...) servaient avec justesse.

Mais depuis quelques temps, Philippe est victime de cette terrible tectonique des plaques qui déplace des îlots entre la droite et sa partie extrême. Alors que Devedjian, Goasguen, Longuet, Madelin, et tous les "réformateurs" imprégnés du corpus idéologique droito-oecuménique du Club de l'horloge, se sont détachés de l'obscurantisme frontiste pour gagner les rivages moins heurtés de la "droite dure" mais républicaine, Philippe, lui, l'ancien de l'UDF (parti européen et libéral au sens noble du terme) s'enfonce progressivement dans le magma post-vichyste, à la différence près qu'il ne cultive pas, comme Le Pen et la majorité des vichystes et néo-vichystes, ce qu'on appelle le "masochisme national".

Comment ne pas déplorer que la seule personnalité politique capable de ramener dans le giron républicain une bonne partie de l'électorat égaré dans le Lepenisme, en les prenant par les tripes patriotistes, provincialistes, traditionalistes, n'ait trouvé d'autre stratégie qu'un mimétisme grossier qu'il n'édulcore que par sa propre personnalité, ô combien moins détestable que celle de Le Pen ? Comment ne pas regretter qu'un des possibles hommes forts d'un pôle conservateur agrégé en réaction à la dérive ultralibérale, atlantiste, francophobe et ploutocrate d'une bonne partie des échapés du gaullisme, se perde en une aventure solitaire pitoyable articulée autour de ces consternants cinq piliers organisés autour d'une idée, le refus : refus des homosexuels, refus des immigrés, refus des turcs, refus de l'expertise technocratique, refus des 35 heures. Une logique de destruction pure et simple, qui ne mérite même pas l'adjectif de conservateur : un banal, très banal populisme xénophobe et réactionnaire.
Encore un nom sur la longue liste des victimes de leurs propres ambitions...