dimanche, mars 25, 2007

La surenchère à la bêtise

En cherchant à se disputer le bout de gras de l'"identité nationale", de peur de voir ce thème surgi d'on ne sait où glisser dans le camp adverse, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal rivalisent de propositions frisant le ridicule.

Ca a commencé avec la création d'un "ministère de l'immigration et de l'identité nationale", proposition de Sarkozy, donc forcément bruyante et source d'un incroyable et vain tintamare parmi tous ceux qui ont le droit de participer au débat politique de manière publique, c'est à dire médiatique. On ne se demande même pas à quoi servirait un tel ministère, quoique passe pour l'immigration, mais quid de ceux qui s'occuperaient de l'identité nationale ? Quel serait concrètement l'action de ces fonctionnaires d'un type nouveau ? Ils franciseraient à tour de bras les nouveaux venus, comme le propose Villiers ? Ils organiseraient des rondes dans tous les halls d'immeuble pour vérifier qu'on n'y égorge pas le mouton dans la cage d'escalier ? Quoiqu'il en soit, étonnante proposition que de manifester un tel attachement soudain à l'identité nationale quand on n'est attaché ni à la place de la France dans le concert des nations, si spécifique depuis de Gaulle jusqu'à Chirac-Villepin, quand on a des vélléités de revenir sur la séparation de l'église et de l'Etat, et plus globalement la séparation des pouvoirs, quand on se fait le chantre de l'"alignement" sur les autres pays au nom de la mondialisation... Vous avez dit double discours ?

Ségolène Royal propose elle que nous ayons tous un drapeau français à la maison. Posséder un drapeau, c'est un acte de patriotisme. Personne ne condamnera dans ces lignes le patriotisme, au contraire, les rédacteurs de ce blog sont attachés à la culture et au patrimoine français, et à son indépendance. Mais le patriotisme ne doit nullement être quelque chose d'imposé, ni même incité par l'Etat. L'idée Villieriste d'obligation d'aimer la France sous peine de la quitter est une des pires conneries proférées ces dernières années dans le débat public (c'est donc d'autant plus lamentable que Sarkozy l'a presque faite sienne) : voir comme nécessaire et indispensable l'existence d'un rapport affectif de l'individu à la nation est une conception proprement totalitaire du patriotisme. En régime démocratique et libéral, c'est un non-sens. Une triste confusion des ordres : l'ordre du politique et l'ordre de l'affect. Nous espérons donc que cette riche idée Ségolène tombera vite dans les oubliettes de la campagne.